Confucius au présent
Une lecture coréenne
Chin Hyung-joon
Traduit par Pyun Hae-ok et Benjamin Joinau
Le mot de l’éditeur
Dans les rayons « sagesse orientale » des librairies, les ouvrages ne manquent pas sur le bouddhisme ou le taoïsme. Rares sont pourtant en langue française les essais introduisant au grand public la pensée confucéenne. C’est qu’elle a en général mauvaise presse et ne possède pas la séduction spirituelle et métaphysique des autres grandes sagesses orientales. Confucius lui-même ne répondait-il pas, à qui lui posait des questions sur le Ciel et l’au-delà, de demander à Lao Tseu, le grand maître taoïste ? On assigne souvent au confucianisme et à son avatar plus « politique », le néoconfucianisme, qui a eu une immense influence sur les sociétés de la sphère culturelle chinoise, la responsabilité à la fois de tous les succès économiques des « tigres » asiatiques des dernières décennies, comme de tous les travers de ces sociétés : individu inféodé au groupe, manque de créativité, poids de la hiérarchie, etc. Ce n’est pas le but de l’auteur.
Dans cet essai intitulé en coréen « Imaginaire de Confucius », le professeur Chin propose un commentaire très personnel de la pensée des grands maîtres du confucianisme. Sa lecture surprendra le lecteur français non habitué au rythme et au mouvement de la pensée extrême orientale. Au lieu de se déployer de manière dialectique et linéaire dans une progression logique autour de concepts bien définis, elle s’enroule sur elle-même dans un mouvement de vortex ascendant, tel le vol d’un oiseau qui profite des flux d’air pour s’élever lentement en tournant et monter à des altitudes que ses ailes seules ne lui auraient pas permis d’atteindre. Cette pensée repose donc sur la répétition, sur le saut apparemment arbitraire et continu d’une idée à l’autre, et au lieu de s’attarder à faire le bilan régulier de ses acquis amassés au cours du raisonnement, elle poursuit son cours dans l’amplification. L’esprit trop cartésien sera littéralement désorienté, voire frustré, s’il ne laisse pas de côté ses habitudes de raisonnement pour se laisser porter par le flux du propos. Car comme dans les Entretiens de Confucius, la parole est très importante ici aussi : la position de Chin Hyung-joon est celle d’un aîné qui nous transmet directement ses réflexions comme dans une conversation libre, espérant nous emmener à sa suite sur la voie, et ce n’est pas celle d’un philosophe qui essaye de nous imposer une vérité par la force de la logique. Il y a quelque chose de Montaigne dans cette manière de penser comme on se promènerait.
Car le but est bien de montrer le chemin d’une pratique de Confucius, non de « prouver » une vérité abstraite qui le resterait sans déboucher sur une éthique. Présenter la doctrine confucianiste comme une école de joie et de plaisir ne manquera pas de surprendre. C’est pourtant ce à quoi nous invite le professeur Chin, au travers de chapitres sur le bonheur des études, la notion de bienveillance (ren en chinois), celle de piété filiale... Car c’est bien d’un livre de sagesse qu’il s’agit.
L’auteur
Chin Hyung-joon (né en 1952) est diplômé de littérature française de la prestigieuse université nationale de Séoul. Spécialiste de l’imaginaire et de Gilbert Durand qu’il a traduit en coréen, il enseigne à l’université Hongik à Séoul. Sa vaste culture classique coréenne comme occidentale lui a permis d’écrire des essais variés ayant toujours comme souci de dépasser le dualisme de la pensée et de promouvoir une pensée holiste où l’imaginaire ne serait plus la « folle du logis ». Son regard, décentré grâce au détour par la méthodologie durandienne, lui donne un regard d’une grande originalité sur la tradition sino-coréenne.
Dans les rayons « sagesse orientale » des librairies, les ouvrages ne manquent pas sur le bouddhisme ou le taoïsme. Rares sont pourtant en langue française les essais introduisant au grand public la pensée confucéenne. C’est qu’elle a en général mauvaise presse et ne possède pas la séduction spirituelle et métaphysique des autres grandes sagesses orientales. Confucius lui-même ne répondait-il pas, à qui lui posait des questions sur le Ciel et l’au-delà, de demander à Lao Tseu, le grand maître taoïste ? On assigne souvent au confucianisme et à son avatar plus « politique », le néoconfucianisme, qui a eu une immense influence sur les sociétés de la sphère culturelle chinoise, la responsabilité à la fois de tous les succès économiques des « tigres » asiatiques des dernières décennies, comme de tous les travers de ces sociétés : individu inféodé au groupe, manque de créativité, poids de la hiérarchie, etc. Ce n’est pas le but de l’auteur.
Dans cet essai intitulé en coréen « Imaginaire de Confucius », le professeur Chin propose un commentaire très personnel de la pensée des grands maîtres du confucianisme. Sa lecture surprendra le lecteur français non habitué au rythme et au mouvement de la pensée extrême orientale. Au lieu de se déployer de manière dialectique et linéaire dans une progression logique autour de concepts bien définis, elle s’enroule sur elle-même dans un mouvement de vortex ascendant, tel le vol d’un oiseau qui profite des flux d’air pour s’élever lentement en tournant et monter à des altitudes que ses ailes seules ne lui auraient pas permis d’atteindre. Cette pensée repose donc sur la répétition, sur le saut apparemment arbitraire et continu d’une idée à l’autre, et au lieu de s’attarder à faire le bilan régulier de ses acquis amassés au cours du raisonnement, elle poursuit son cours dans l’amplification. L’esprit trop cartésien sera littéralement désorienté, voire frustré, s’il ne laisse pas de côté ses habitudes de raisonnement pour se laisser porter par le flux du propos. Car comme dans les Entretiens de Confucius, la parole est très importante ici aussi : la position de Chin Hyung-joon est celle d’un aîné qui nous transmet directement ses réflexions comme dans une conversation libre, espérant nous emmener à sa suite sur la voie, et ce n’est pas celle d’un philosophe qui essaye de nous imposer une vérité par la force de la logique. Il y a quelque chose de Montaigne dans cette manière de penser comme on se promènerait.
Car le but est bien de montrer le chemin d’une pratique de Confucius, non de « prouver » une vérité abstraite qui le resterait sans déboucher sur une éthique. Présenter la doctrine confucianiste comme une école de joie et de plaisir ne manquera pas de surprendre. C’est pourtant ce à quoi nous invite le professeur Chin, au travers de chapitres sur le bonheur des études, la notion de bienveillance (ren en chinois), celle de piété filiale... Car c’est bien d’un livre de sagesse qu’il s’agit.
L’auteur
Chin Hyung-joon (né en 1952) est diplômé de littérature française de la prestigieuse université nationale de Séoul. Spécialiste de l’imaginaire et de Gilbert Durand qu’il a traduit en coréen, il enseigne à l’université Hongik à Séoul. Sa vaste culture classique coréenne comme occidentale lui a permis d’écrire des essais variés ayant toujours comme souci de dépasser le dualisme de la pensée et de promouvoir une pensée holiste où l’imaginaire ne serait plus la « folle du logis ». Son regard, décentré grâce au détour par la méthodologie durandienne, lui donne un regard d’une grande originalité sur la tradition sino-coréenne.
automne 2017 |
Livre publié dans le cadre de l’Année France-Corée 2015-2016 : www.anneefrancecoree.com
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