A l'occasion des rives
Essai sur les modalités du sensible
Yves Millet
120 pages
ISBN : 979-10-91555-12-8
Photographie de couverture : Bukhansan 2012. Nathalie SAVEY.
SOMMAIRE :
AVANT-PROPOS
OUVERTURE
Un embarras philosophique
PRISME
Modulations & ornements
VARIATIONS
Suseok & ready-made
Du concret. Le cas Gutai
Rythme & intensité
ÉPILOGUE
120 pages
ISBN : 979-10-91555-12-8
Photographie de couverture : Bukhansan 2012. Nathalie SAVEY.
SOMMAIRE :
AVANT-PROPOS
OUVERTURE
Un embarras philosophique
PRISME
Modulations & ornements
VARIATIONS
Suseok & ready-made
Du concret. Le cas Gutai
Rythme & intensité
ÉPILOGUE
Cet essai regroupe un ensemble d’analyses se rapportant à différents pays d’Asie de l’Est. Dans un dialogue avec des philosophes tels que Gilles Deleuze, Gilbert Simondon ou John Dewey, l’auteur propose une lecture modale de l’expérience du sensible propre à des objets ou des usages se situant entre art et vie quotidienne ; cas de figure ou situations où rien n’opère plus aisément et où il devient nécessaire de patiemment reconstruire un regard pour goûter aux singularités esthétiques qui nous entourent.
Sommaire détaillé
Avant-propos
I - OUVERTURE
Un embarras philosophique
Donne à l’ensemble des considérations d’ordre esthétique suivantes un cadre plus général, qui est celui de savoir comment échapper à cette forme d’embarras qui caractérise régulièrement l’appréhension des pensées philosophiques traditionnelles d’Asie de l’Est par les penseurs et philosophes occidentaux. Il ne s’agit nullement de jeter les bases d’un procès mais de repérer dans un premier temps la nature et les conditions, les arguments et motivations sous-jacents majeurs qui justifient une telle distance prudente, que nous nommons embarras. Dans un deuxième temps, nous tenterons de dépasser les conditions de cet embarras en montrant qu’il n’a pas lieu d’être si nous acceptons de reconsidérer ce qu’il recouvre, à savoir la représentation que nous nous donnons de l’exercice de la pensée.
II - PRISME
Modulations & ornements
Vouloir penser la diversité en esthétique oblige non seulement à penser la diversité des cultures mais nous oblige également à penser la diversité des paradigmes en usage. Montrer en quoi la musique modale entre singulièrement en résonance avec la philosophie de la différence deleuzienne exposée notamment dans Différence et répétition (1968), philosophie qui a pour fondements l’intensité et la pluralité au détriment de la représentation et de l’identité, ouvre pour la musique modale en particulier et la philosophie de l’art en général des perspectives non négligeables. La musique modale – dont l’Asie reste un des dépositaires privilégiés – nous paraît tout autant que la musique sérielle être un modèle pertinent pour illustrer les rapports entre les logiques différentielle et modale. Par conséquent, la musique modale n’est pas dissociable d’un certain mode d’appréhension du monde.
III - VARIATIONS
Suseok & ready-made
Entreprend une mise en parallèle du Suseok ou pierre évocatrice (水 石 – Suiseki en japonais) et du Ready-made duchampien afin de mettre en lumière, dans le même temps, ce qui les différencie et ce qui les rapproche. Nous constaterons ainsi que ces deux objets partagent trois caractéristiques : ils sont relatifs à une sélection plus ou moins arbitraire, ils existent en tant qu’objet artistique du seul fait d’un déplacement (conforté par ce que nous nommons les signes extérieurs de l’art, c’est-à-dire le contexte et la manière dont ils sont présentés) et, enfin, ce déplacement est réversible.
Cette confrontation symétrique nous oblige par conséquent à reprendre la question de l’œuvre d’art, celle de sa possible définition. Non au regard du résultat final et de son éventuelle classification dans un genre spécifique (perspective propre à l’esthétique) mais au regard de son processus même d’élaboration (perspective propre à la philosophie de l’art). En d’autres termes, il ne faudrait plus tant se poser la question « qu’est-ce qu’une œuvre d’art ? » mais comment un objet donné peut devenir le support d’une expérience esthétique ? Grâce à cette mise en parallèle, nous passons ainsi de l’analyse prédicative d’un objet dit d’art à l’analyse de pratiques hybrides, lieu de rencontre d’une intention artistique et d’un regard, celui toujours renouvelé du spectateur.
Du concret. Le cas Gutai.
Dans le but de fournir quelques outils d’analyse de la performance artistique, nous avons choisi de reconsidérer sous l’angle de l’hylémorphisme les réalisations du groupe japonais Gutai. Ceci parce que 1°) la performance artistique est une remise en cause radicale du schéma classique de la création ayant pour principal fondement l’opération de mise en forme d’une matière donnée ;
2°) parce que les propositions de Gutai contiennent en germe un très grand nombre de propositions artistiques qui prendront place des années 60 jusqu’à aujourd’hui et 3°) parce que considérer ce groupe artistique initiateur de l’art de la performance permet d’établir une distance autrement éclairante vis-à-vis des catégories esthétiques dont nous héritons.
Rythme & intensité
L’esthétique du quotidien est souvent considérée comme une sous-catégorie de l’esthétique de l’art. Ceci est une conséquence de l’utilisation de l’art, et plus précisément des arts visuels en tant que référence privilégiée. Pour qualifier l’expérience sensible du quotidien, il nous paraît cependant plus pertinent d’employer des modèles qui se réfèrent au rythme et à l’intensité, tels que l’ornement, la poésie ou la musique. Un tel déplacement offre l’opportunité de repenser un certain nombre d’expériences communes dont l’identité qualitative peut se retrouver dans une plus subtile mais non moins significative dimension de nos vies. Afin de rendre l’analyse plus concrète, nous nous limiterons à des exemples connus de la culture du Japon où l’idée même de cette réflexion est née. En conclusion, nous argumenterons en faveur d’un ethos sans objet pensé comme voie par laquelle approcher sinon qualifier l’expérience de la beauté quotidienne.
Épilogue
Avant-propos
I - OUVERTURE
Un embarras philosophique
Donne à l’ensemble des considérations d’ordre esthétique suivantes un cadre plus général, qui est celui de savoir comment échapper à cette forme d’embarras qui caractérise régulièrement l’appréhension des pensées philosophiques traditionnelles d’Asie de l’Est par les penseurs et philosophes occidentaux. Il ne s’agit nullement de jeter les bases d’un procès mais de repérer dans un premier temps la nature et les conditions, les arguments et motivations sous-jacents majeurs qui justifient une telle distance prudente, que nous nommons embarras. Dans un deuxième temps, nous tenterons de dépasser les conditions de cet embarras en montrant qu’il n’a pas lieu d’être si nous acceptons de reconsidérer ce qu’il recouvre, à savoir la représentation que nous nous donnons de l’exercice de la pensée.
II - PRISME
Modulations & ornements
Vouloir penser la diversité en esthétique oblige non seulement à penser la diversité des cultures mais nous oblige également à penser la diversité des paradigmes en usage. Montrer en quoi la musique modale entre singulièrement en résonance avec la philosophie de la différence deleuzienne exposée notamment dans Différence et répétition (1968), philosophie qui a pour fondements l’intensité et la pluralité au détriment de la représentation et de l’identité, ouvre pour la musique modale en particulier et la philosophie de l’art en général des perspectives non négligeables. La musique modale – dont l’Asie reste un des dépositaires privilégiés – nous paraît tout autant que la musique sérielle être un modèle pertinent pour illustrer les rapports entre les logiques différentielle et modale. Par conséquent, la musique modale n’est pas dissociable d’un certain mode d’appréhension du monde.
III - VARIATIONS
Suseok & ready-made
Entreprend une mise en parallèle du Suseok ou pierre évocatrice (水 石 – Suiseki en japonais) et du Ready-made duchampien afin de mettre en lumière, dans le même temps, ce qui les différencie et ce qui les rapproche. Nous constaterons ainsi que ces deux objets partagent trois caractéristiques : ils sont relatifs à une sélection plus ou moins arbitraire, ils existent en tant qu’objet artistique du seul fait d’un déplacement (conforté par ce que nous nommons les signes extérieurs de l’art, c’est-à-dire le contexte et la manière dont ils sont présentés) et, enfin, ce déplacement est réversible.
Cette confrontation symétrique nous oblige par conséquent à reprendre la question de l’œuvre d’art, celle de sa possible définition. Non au regard du résultat final et de son éventuelle classification dans un genre spécifique (perspective propre à l’esthétique) mais au regard de son processus même d’élaboration (perspective propre à la philosophie de l’art). En d’autres termes, il ne faudrait plus tant se poser la question « qu’est-ce qu’une œuvre d’art ? » mais comment un objet donné peut devenir le support d’une expérience esthétique ? Grâce à cette mise en parallèle, nous passons ainsi de l’analyse prédicative d’un objet dit d’art à l’analyse de pratiques hybrides, lieu de rencontre d’une intention artistique et d’un regard, celui toujours renouvelé du spectateur.
Du concret. Le cas Gutai.
Dans le but de fournir quelques outils d’analyse de la performance artistique, nous avons choisi de reconsidérer sous l’angle de l’hylémorphisme les réalisations du groupe japonais Gutai. Ceci parce que 1°) la performance artistique est une remise en cause radicale du schéma classique de la création ayant pour principal fondement l’opération de mise en forme d’une matière donnée ;
2°) parce que les propositions de Gutai contiennent en germe un très grand nombre de propositions artistiques qui prendront place des années 60 jusqu’à aujourd’hui et 3°) parce que considérer ce groupe artistique initiateur de l’art de la performance permet d’établir une distance autrement éclairante vis-à-vis des catégories esthétiques dont nous héritons.
Rythme & intensité
L’esthétique du quotidien est souvent considérée comme une sous-catégorie de l’esthétique de l’art. Ceci est une conséquence de l’utilisation de l’art, et plus précisément des arts visuels en tant que référence privilégiée. Pour qualifier l’expérience sensible du quotidien, il nous paraît cependant plus pertinent d’employer des modèles qui se réfèrent au rythme et à l’intensité, tels que l’ornement, la poésie ou la musique. Un tel déplacement offre l’opportunité de repenser un certain nombre d’expériences communes dont l’identité qualitative peut se retrouver dans une plus subtile mais non moins significative dimension de nos vies. Afin de rendre l’analyse plus concrète, nous nous limiterons à des exemples connus de la culture du Japon où l’idée même de cette réflexion est née. En conclusion, nous argumenterons en faveur d’un ethos sans objet pensé comme voie par laquelle approcher sinon qualifier l’expérience de la beauté quotidienne.
Épilogue
(...EXTRAIT...)
À l’heure où nos mondes communs se trouvent fortement redistribués, sommes-nous encore en droit de penser la différence en termes d’altérité ? À l’heure où les relations entre local et global continuent de se réinventer, ne serions-nous pas conviés à prendre en compte autrement ce qui peut parfois se concevoir comme différent ou étrange mais ne peut plus être pensé comme un autre absolu ? Dans les pages qui vont suivre, l’éventuelle réponse à ce questionnement aura pour point de départ l’expérience sensible.
Plus précisément, il s’agit de montrer dans quelle mesure, les questions relatives à l’expérience sensible, opèrent en deçà des grands ensembles ou classifications usuelles ou, si l’on préfère, au-delà de ce que nous nommerons nos catégories héritées. L’expérience (du) sensible, en dépit du fait qu’elle a pour trait fondamental d’être partagée à divers degrés par tous, c’est-à-dire qu’elle nous est commune, subit le contrecoup d’oppositions qui nuisent à la reconnaissance du simple fait que – précisément parce que commune – elle relie ou rassemble plus qu’elle ne divise. Autrement dit, elle contrevient aux découpages successifs dont use, dans des proportions mortifiantes, la pléthore de nos discours critiques. Nous lui privilégierons l’idée de seuils ou de points de bifurcations. Idée qui suggère une autre lecture des différents modes et déploiements de l’expérience esthétique qui relève donc de l’aesthesis, c’est-à-dire de la sensation ou perception sensible liée ou non à une pratique artistique. Le but étant, au final, de proposer un registre d’interprétation plus étendu sinon plus nuancé, d’objets ou usages se situant entre art et vie quotidienne. Cette proposition sera argumentée, de manière exemplaire, par un ensemble d’analyses et de pratiques se rapportant à l’Asie de l’Est, zone géographique où nous exerçons.
(...)
À l’heure où nos mondes communs se trouvent fortement redistribués, sommes-nous encore en droit de penser la différence en termes d’altérité ? À l’heure où les relations entre local et global continuent de se réinventer, ne serions-nous pas conviés à prendre en compte autrement ce qui peut parfois se concevoir comme différent ou étrange mais ne peut plus être pensé comme un autre absolu ? Dans les pages qui vont suivre, l’éventuelle réponse à ce questionnement aura pour point de départ l’expérience sensible.
Plus précisément, il s’agit de montrer dans quelle mesure, les questions relatives à l’expérience sensible, opèrent en deçà des grands ensembles ou classifications usuelles ou, si l’on préfère, au-delà de ce que nous nommerons nos catégories héritées. L’expérience (du) sensible, en dépit du fait qu’elle a pour trait fondamental d’être partagée à divers degrés par tous, c’est-à-dire qu’elle nous est commune, subit le contrecoup d’oppositions qui nuisent à la reconnaissance du simple fait que – précisément parce que commune – elle relie ou rassemble plus qu’elle ne divise. Autrement dit, elle contrevient aux découpages successifs dont use, dans des proportions mortifiantes, la pléthore de nos discours critiques. Nous lui privilégierons l’idée de seuils ou de points de bifurcations. Idée qui suggère une autre lecture des différents modes et déploiements de l’expérience esthétique qui relève donc de l’aesthesis, c’est-à-dire de la sensation ou perception sensible liée ou non à une pratique artistique. Le but étant, au final, de proposer un registre d’interprétation plus étendu sinon plus nuancé, d’objets ou usages se situant entre art et vie quotidienne. Cette proposition sera argumentée, de manière exemplaire, par un ensemble d’analyses et de pratiques se rapportant à l’Asie de l’Est, zone géographique où nous exerçons.
(...)
Yves Millet est professeur au département d’études françaises
de l’université Hankuk des études étrangères en Corée du Sud et chercheur associé à l’UMR Architecture Milieu Paysage (AMP) 7218 CNRS LAVUE. Ses recherches portent sur la philosophie de l’art, l’esthétique comparative et environnementale. |
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